Orexovo-Zuevo

C'etait le matin, il faisait froid et gris. J'avais parcouru 80 km dans sa voiture rouge. La direction m'avait dit que je pourrais la recuperer, qu'elle m'aiderait. Arrive la, je m'adressai a l'homme au guichet. Il etait rustre comme l'endroit. Je lui expliquai la situation et il chercha mais il ne la trouva pas. J'insistai et il telephona a la direction. Il me dit que personne ne repondait, qu'il falait que je revienne, mais c'etait le dernier jour de mon visa.  Je m'y rendis mais la porte etait close. Je retournai donc a l'hopital. Plus loin, a une autre guichet de je ne ne sais quel departement, je trouvai une vieille dame. Elle semblait gentille, et je lui expliquai la situation. Elle me renseigna aimablement l'endroit et me dit: "Que Dieu vous vienne en aide!" Je cherchai l'endroit dans la cour. J'eprouvais de la peine a m'orienter. Je trouvai d'abord le magasin. La vendeuse me montra les articles. J'en choisis un et le soupesai car la voiture etait garee a environ 600 metres. Avec tact, elle me renseigna plus en details l 'endroit, et je le trouvai finalement. Une petite maison de briques jaunies et sales. De la cheminee rouillee sortait une fumee acre. Un employe m'ouvrit. Il etait grand, brun, un peu corpulent, les cheveux degarnis. Bien que calme, son regard semblait en revolte; certainement pour survivre a la tache. Sur le pas de la porte, il me dit d'aller chercher ce qu il faut. J'y allai, reglai et revint. Il me fit entrer. La piece etait sombre. Il me fit signer des papiers. Je deposai la caisse sur le comptoir. Il la prit et me dit: "Vous voulez voir?" Ahuri, je poussai avec effroi: "Non". Il partit dans la remise et je demeurai seul dans cette piece. Je me souviens de petits corps flottant dans des bocaux. Il revint, deposa la caisse sur le comptoir et la vissa devant moi.
Ainsi, je m en allai, ne sachant plus ou j etais, a travers la cour de l hopital.
Je me souviens que mon ame des pieds a la tete cherchait a sortir de mon corps -sans issue. Au fur et a mesure de mes pas, parfois je sentais son petit corps glisser dans le cercueil. Dans mon coeur alors je ressentais le poids de ma petite fille.
Les passants horrifies regardaient notre cortege funebre s'avancer.
Une vieille dame s arreta a une quinzaine de metres de nous, deposa son sac sur le sol, leva les mains jusqu a ses joues, et puis en fermant les yeux nous fit un signe de croix.
Je demandai a un homme la sortie. Je me savais plus m orienter. Maitrisant ses emotions, n osant me regarder, il me renseigna avec tact et repartit, apeure.
J approchai de la voiture, ouvrit le coffre, y deposai le cercueil, et je sentis a nouveau son corps glisser.
Je glissai avec elle et en un meme mouvement refermai la porte et me rattrappai a elle.
Apres quelque temps, je me ressaisis et partis au cimetiere dans la voiture couleur de sang.

...

Je remercie le personnel du Consulat de Russie en Belgique pour leur comprehension, leur amabilite, de m avoir en urgence accorder un visa pour tenter de sauver notre fille mais finalement accorder une sepulture chretienne a notre defunte Marie.
Je remercie aussi ces personnes inconnues de cet hopital de m avoir temoigne du soutien malgre leur effroi. 
Cela a nous a permis a mon epouse et a moi de pouvoir mieux passer cette epreuve.
Quant a la rudesse de la situation, l inquietude qui point parfois face a l etranger et en ce genre de situation, je sais que la Russie a beaucoup souffert et souffre toujours, et ce n est pas cela qui m empechera ni de la comprendre ni de l aimer. Il faut enormement de temps pour rebatir et cela ne se fait pas sans peine.
Aujourd'hui, en me levant ce matin, sans doute mes troubles et leur lourdeur me rememorerent ce moment pesant qui demeure a jamais grave en moi.






 


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